Résolution d’un bail commercial sans justification en l’absence d’ERP

L’ERP — état des risques et pollution — est un document de diagnostic immobilier qui informe le preneur d’un bail commercial des risques naturels et technologiques dus à certains effets de la pollution des sols.

Ce diagnostic doit nécessairement être fourni par le bailleur lors de la signature d’un contrat de bail commercial.

Cette nécessité a été confirmée par l’arrêt du 2 février 2022 rendu par la Cour d’appel de Paris.

Comme le stipulent les articles L. 145-1 et L. 145-2 du Code de commerce (art. L 125-5, II-al. 2 du Code de l’environnement), en cas de défaut de remise au locataire de l’ERP daté de moins de six mois et annexé au bail commercial, le preneur est en droit de demander la résolution du bail sans avoir à justifier d’un quelconque préjudice.

L’affaire

Cette décision fait suite à une affaire opposant la société Gallieni, propriétaire d’un local commercial et de deux emplacements de parking à Nanterre, entrée en négociation avec la société Pinon en vue de la conclusion d’un bail commercial via une agence immobilière, à effet du 1er juin 2012.

« La société Pinon ayant abandonné son projet, a proposé à l’agence de régler sa commission et à la société Gallieni de conserver à titre d’indemnité le dépôt de garantie versé le 25 mai.

Par commandement de payer du 15 février 2013 visant la clause résolutoire, la société Gallieni a poursuivi le paiement des loyers depuis le 1er juin 2012. Par acte du 18 mars 2013, la société Pinon a formé opposition à commandement et saisi le tribunal d’une action tendant en outre à la restitution du dépôt de garantie et en paiement de dommages intérêts.

La société Gallieni Nanterre a formé des demandes reconventionnelles en paiement de loyers et charges, et elle a fait signifier deux autres commandements de payer visant la clause résolutoire les 16 septembre et 1er octobre 2013.

Le tribunal de grande instance de Nanterre par jugement du 27 mars 2014 a constaté la nullité des commandements délivrés par la société Gallieni, a constaté l’absence de bail entre les parties et débouté la société Gallieni Nanterre de ses demandes et la société Pinon de sa demande de restitution d’une somme versée au titre du dépôt de garantie ainsi que de sa demande de dommages et intérêts.

Par déclaration en date du 4 avril 2014, la société Gallieni Nanterre a interjeté appel de ce jugement.

L’arrêt rendu le 7 avril 2015, par la cour d’appel de Versailles qui a infirmé le jugement, dit que le bail avait été conclu, prononcé sa résiliation judiciaire à la date du 1er juin 2012 aux torts réciproques des parties a été cassé par arrêt de la 3e chambre civile de la Cour de Cassation le 20 octobre 2016 pour défaut de base légale.

L’arrêt rendu le 15 janvier 2019 sur renvoi après cassation, par la cour d’appel de Versailles autrement composée, qui a de nouveau infirmé le jugement du 27 mars 2014 et a prononcé la résolution du contrat de bail du 9 mai 2012 à leurs torts réciproques, a été cassé par arrêt de la 3e chambre civile de la Cour de cassation le du 10 septembre 2020, pour défaut de base légale, reprochant à la cour d’appel de ne pas avoir recherché si le manquement imputé à la bailleresse était d’une gravité suffisante, dans les circonstances de l’espèce, pour justifier la résiliation du contrat de location. »

La Cour d’appel de Paris a prononcé la résolution du bail commercial aux torts du bailleur, le preneur n’ayant pas à justifier d’un quelconque préjudice puisque « la communication d’un état des risques naturels et technologiques daté de moins de 6 mois constitue une obligation légale d’information à la charge du bailleur. »

En l’espèce, « il n’est pas contesté que seul un état des risques naturels et technologiques daté du 2 octobre 2009 a été communiqué par le bailleur au preneur, ancien de plus de six mois avant la conclusion du bail. »

La Cour d’appel de Paris a donc statué sur le défaut de remise par le bailleur d’un état des risques naturels et technologiques de moins de six mois, lors de la conclusion du bail, permettant au preneur de poursuivre la résolution du bail, ce qui a pour effet d’anéantir le contrat ab initio.